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« La France est championne du monde des démarches de certification »

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INTERVIEW : Julien Frayssignes, enseignant chercheur à l’École d’ingénieurs de Purpan et membre fondateur de la chaire In’Faaqt*, est intervenu aux dernières Universités du soir organisées le 2 octobre pour faire un point de contexte sur les labels et la certification en France.

Retour sur son intervention.

Pourquoi les labels se sont-ils multipliés ces dernières années ?
Julien Frayssignes : Nous sommes dans un contexte de transition alimentaire et agricole.
Ces transitions sont progressives et donc complexes. Il existe une infinité de chemins qui peuvent aller vers davantage de transitions.
On les retrouve donc à plusieurs niveaux : dans les nouvelles attentes des consommateurs, dans les évolutions législatives en France et à l’international et au niveau des exploitations agricoles.
Les grandes tendances de la transition alimentaire portent sur la qualité (bio, local, sans sucre ajouté, sans additifs, sans pesticides, sources alternatives de protéines, etc.) et la quantité (moins de nourriture, de viande, de déchets). La transition agroécologique
concerne, quant à elle, les pratiques agronomiques (comme la diversification des cultures, l’allongement des rotations, l’implantation d’infrastructures économiques, etc.) et les pratiques de commercialisation des produits plus directes (marchés locaux, circuits
courts, drives fermiers, etc.).
La transition se déroule également sur toute la filière (consommateurs, distributeurs, transformateurs, producteurs) selon des principes qui se renforcent sur la recherche de traçabilité et de transparence, la certification par un tiers, la performance agronomique,
mais aussi avec une obligation de moyens et de résultats.
Donc l'idée d’un large mouvement de fond qui touche toutes les composantes du monde agricole.

La diversité des labels est donc une conséquence des transitions en cours ?

Tout à fait. La France est en quelque sorte championne du monde des démarches de certification ! Il en existe beaucoup, des publiques, des privées, avec des promesses très différentes. Dans la chaire In’Faaqt*, nous avons étudié l’évolution du nombre d’adhérents engagés dans les différentes certifications qui s’inscrivent dans les transitions. Ils montent tous en puissance, en particulier depuis ces dix dernières années.
Notamment avec l’apparition de nouvelles démarches de certification (dont la HVE) qui ont des principes similaires aux anciennes comme l’adhésion libre et le respect d’un cahier des charges contrôlé par un organisme indépendant, mais qui portent en général davantage sur des produits du quotidien en milieu de gamme et sont plus imprégnées par des logiques de progrès et d’amélioration continue. Elles modifient donc leur référentiel régulièrement en conséquence.
Ces démarches, portées le plus souvent majoritairement par les transformateurs, se concentrent plus sur les pratiques que sur la qualité avec un aspect plus global qu’avant (social, environnemental, économique) et peuvent avoir un positionnement sur un critère
bien particulier (comme le label Zéro résidu de pesticides).

Quelles perceptions ont les consommateurs et les distributeurs de ces certifications ?

Il est très compliqué pour les consommateurs de s’y retrouver dans la jungle des labels mais ils font quand même confiance aux démarches. Celles qui incitent le plus à l’achat pour le moment sont celles qui sont plutôt anciennes et publiques, comme l’AOP, le bio,
le Label rouge. Le Nutri-score est un label plutôt jeune mais qui tire bien son épingle du jeu en étant bien reconnu pour son positionnement sur la santé.

Vers quoi les exploitations agricoles doivent-elles tendre ?

Ce que l’on constate aujourd’hui, c’est une stratégie qui vise à jouer sur plusieurs tableaux. On observe que les entreprises vont aller par exemple vers des démarches publiques quand elles le peuvent et ajouteront également la HVE et un label privé comme Zéro résidu de pesticides, Demain la Terre ou Bleu-blanc-coeur en fonction de leur production. Mais le cumul de différentes démarches semble être privilégié dans la mesure où aucun label unique et universel ne semble promettre tout ce dont on a besoin pour exister sur le marché même si en termes d’audit et de certification, ça rend les choses plus compliquées.

*Première chaire d’enseignement et de recherche dédiée aux démarches de qualification en agriculture.


 

L’intervention de Julien Frayssignes est à retrouver en intégralité sur le replay des Universités du soir